Introduction
Nous parlons dans ce livre
de résultats anormaux. Si l'Esprit tout puissant exerce sa souveraineté
dans les cœurs et les consciences, le résultat doit être
hors de la normale.
Le docteur AT. Schofield
écrit, dans sa préface au livre de Miss Dyer, "Le Réveil
aux Indes" : "Nous devons comprendre une chose, c'est que, depuis la Pentecôte,
le travail soudain et direct de l'Esprit de Dieu sur les âmes a
toujours été accompagné de manifestations plus ou
moins anormales. Après tout, n'est-ce pas naturel? Nous pouvons
nous attendre à ce qu'un flot surabondant de puissance et de lumière
divines agissant profondément sur les émotions et transformant
les vies, ait de remarquables résultats.
"De même qu'un tremblement
de terre, une inondation, un ouragan, sont des manifestations extraordinaires,
un Réveil véritable est un événement qui sort
de l'ordinaire" .
Peut-être aucun mouvement
du Saint-Esprit depuis la Pentecôte n' a-t-il été
aussi riche en résultats que le Réveil morave du 18ème
siècle. Nous lisons ceci: "A midi environ, le dimanche 10 août
1727, pendant que le pasteur Rothe faisait une réunion à
Herrnhut, il se sentit submergé par la puissance merveilleuse et
irrésistible du Seigneur et s'effondra dans la poussière
devant Dieu. Toute l'assemblée fit comme lui, dans des sentiments
d'une intensité inexprimable. Ils continuèrent ainsi jusqu'à
minuit, priant, chantant dans les pleurs et les supplications" () [John
Greenfield : Power from on High, p. 24 (traduit des souvenirs de
l'Eglise morave renouvelée].
Les récits qui nous
ont été conservés de "l'agape" à Fetterlane,
à Londres, le jour de l'an 1739, nous donnent un aperçu
des débuts d'un autre grand mouvement qui commença à
la même époque. Soixante Moraves assistaient à cette
réunion, et sept Méthodistes d'Oxford : John Wesley et son
frère Charles, Georges Whitefield, Wesley Hall, Benjamin Ingham,
Charles Kinchin et Richard Hutchins, tous pasteurs consacrés de
l'Eglise anglicane. Wesley écrit, à propos de cette réunion
:
"A trois heures du matin,
alors que nous priions avec insistance, la puissance de Dieu vint avec
force sur nous, à tel point que beaucoup pleuraient de joie et
plusieurs tombaient par terre.
Aussitôt que nous fûmes
un peu revenus de la crainte et de l'étonnement causés par
la présence de Sa Majesté Sainte, nous chantâmes d'une
seule voix: "Nous te louons ô Dieu; nous te reconnaissons comme
le Seigneur". (1) [John Greenfield : Power from on High, p. 35
(traduit du Journal de Wesley). Fragment de la liturgie anglicane.]
J'étudiais à
Knox College, quand M. Moody fit une série de réunions de
trois jours à Toronto pendant l'hiver de 1883. Je n'ai jamais vu
une réunion plus émouvante que celle d'un certain après-midi.
Aucun œil n'était sec, et ceux qui commençaient à
prier étaient vite arrêtés par leur émotion.
Cependant, tout en parlant
des manifestations de la Pentecôte comme anormales, nous maintenons
que la Pentecôte fut le Christianisme normal. Quand le Saint-Esprit,
prenant la place de Jésus-Christ, se charge du contrôle,
les résultats sont toujours conformes au plan divin.
"Chacun était fortifié
par l'Esprit dans l'homme intérieur. Christ habitait dans leurs
cœurs par la foi, ils étaient enracinés et fondés
dans l'amour. Ils étaient remplis de toute la plénitude
de Dieu, et Dieu faisait en eux et par eux au-delà de tout ce qu'ils
avaient demandé ou pensé."
Se contenter de moins, c'eût
été ravir au Seigneur les mérites du Calvaire. Le
but du Saint-Esprit était de glorifier le Seigneur Jésus
tous les jours, depuis son couronnement jusqu'à son retour. Il
est inconcevable qu'il se lasse de bien faire. Ma conviction est que la
puissance divine, si manifeste dans l'Eglise de Pentecôte, doit
être en évidence de la même façon dans l'Eglise
actuelle. Le Christianisme normal, dans les intentions du Seigneur, ne
devait pas commencer par l'Esprit pour finir par la Chair. La construction
du temple spirituel ne se poursuit ni par la puissance, ni par la force,
mais toujours par Son Esprit. (2) [Zacharie 4/6].
Ce fut après avoir
été rempli de l'Esprit, que le Seigneur lui-même se
rencontra avec Satan et le terrassa. Aucun enfant de Dieu n'a jamais remporté
la victoire sur l'adversaire, sans avoir reçu la puissance de la
même source.
Le Seigneur n'a pas permis
à ses disciples de témoigner en son Nom, sans avoir d'abord
été revêtus de la puissance d'En-Haut. Il est vrai
qu'avant ce jour-là, ils étaient nés de nouveau,
étaient devenus des enfants du Père céleste, et avaient
reçu le témoignage de l'Esprit. Mais ils n'étaient
pas des collaborateurs capables, et ne pouvaient l'être, avant d'être
remplis du Saint-Esprit. Cette puissance divine est pour nous comme pour
eux. Nous aussi, nous pouvons faire les œuvres que notre Seigneur a faites,
et même en faire de plus grandes. A mon sens, l'Ecriture ne veut
pas dire autre chose que ceci : le plan du Seigneur Jésus est que
le Saint-Esprit continue à agir parmi nous, de notre temps, par
des manifestations aussi puissantes que celles de la Pentecôte.
Un seul doit pouvoir en chasser mille et en mettre en fuite dix mille,
car Jésus-Christ est le même hier, aujourd'hui et éternellement.
Mais est-ce que ce baptême
du Saint-Esprit a des effets durables? Combien de fois l'incrédulité
m'a posé cette question! Naturellement l'œuvre durera, si l'homme
est fidèle. Lorsque les rachetés par le sang du Christ se
laissent complètement dominer par leur Sauveur, toutes les ressources
de Dieu le Père sont mises en activité pour la gloire de
l'Agneau qui a été immolé.
L'efficacité du baptême
du Saint-Esprit et de feu ne disparaît que quand l'âme éteint
volontairement l'Esprit.
Est-ce que la Pentecôte
a duré? Est-ce que Dieu a voulu qu'elle cessât? La Pentecôte
était de Dieu. Le Réveil de Wesley l'était aussi.
Ce n'est donc pas Dieu, mais l'homme qu'il faut blâmer de ce que
les canaux par lesquels passaient les flots de bénédiction
ont été obstrués. Pouvons-nous imaginer un homme
décidé à collaborer avec Dieu jusqu'à l'extrême
limite de ses forces et se posant la question : "Est-ce que cela durera
?"
A un certain endroit, en
Mandchourie, le Saint-Esprit était descendu sur les gens avec une
puissance extraordinaire. Les évangélistes chinois allèrent
demander au missionnaire pourquoi il ne leur avait jamais dit que l'Esprit
pouvait travailler avec une telle puissance.
Le missionnaire répondit
humblement que lui-même ignorait que cela fût possible. Quelle
tristesse, de sortir "des écoles de prophètes", et de ne
pas savoir que le Saint-Esprit peut nous revêtir de puissance, afin
que nous puissions délivrer un message de prophète!
Une association de pasteurs
d'une certaine ville du Canada m'invita à leur parler du Réveil
que le Saint-Esprit opérait en Chine. Je leur assurai que je n'avais
aucune raison de me croire un favori du Tout-Puissant. Ce que Dieu avait
fait en Chine, il le ferait volontiers pour eux au Canada. Par conséquent,
chaque serviteur de Dieu devait avoir la foi et le courage de croire que
Dieu le Saint-Esprit pouvait réveiller son peuple. Je leur montrai
que John Wesley et ses collègues avaient été des
hommes ordinaires, jusqu'à ce que leurs cœurs fussent touchés
par le feu divin. A ce moment-là, un prédicateur méthodiste
réputé m'interrompit : "Quoi, Monsieur, s'écria-t-il,
voulez-vous dire que nous ne prêchons pas bien mieux aujourd'hui
que John Wesley? "
- "Avez-vous les mêmes
résultats que lui ?", demandai-je.
Une autre fois, on me demanda
de parler à un synode presbytérien, à Toronto. Mon
sujet était le Réveil de 1908 à Changtehfu. Je me
souviens de ce Réveil comme le plus puissant que j'aie jamais vu.
Pendant les dix jours merveilleux que les réunions durèrent,
je dus renoncer sept fois à prononcer une allocution, tant l'Esprit
de Dieu brisait les cœurs. Pendant que je racontais tout cela au synode,
un certain professeur de théologie, assis près de moi, n'avait
pas l'air heureux. Mon récit de la puissance que le Saint-Esprit
possède pour convaincre de péché un auditoire chinois
semblait agacer ses nerfs. On me dit plus tard qu'un autre professeur
de théologie, assis dans une autre partie de la salle, n'avait
pas l'air à son aise, il finit par se retourner et dire entre ses
dents : "Quelle stupidité !" (l) [En anglais: "rats !"]. Il était
bien près d'avoir commis le péché contre le Saint-Esprit.
Est-ce que vraiment de tels prophètes peuvent former dans leurs
écoles, des jeunes prédicateurs possédés par
le message du Saint-Esprit? Pouvons-nous être étonnés
que la spiritualité de la chrétienté soit à
un niveau si bas?
Trente-deux pour cent des
Eglises des Etats-Unis n'ont eu aucune augmentation de membres en 1927.
Les auditoires religieux en Grande-Bretagne ont diminué de moitié
depuis vingt-cinq ans.
Un réveil du Saint-Esprit, ou l'Apostasie.
Nous sommes convaincus que
la majorité des chrétiens vivent à un niveau spirituel
beaucoup plus bas que celui que leur Maître veut pour eux. Quelques-uns
seulement "entrent dans leurs possessions". Rien ne peut nous revêtir
de la puissance victorieuse, sinon le baptême du Saint-Esprit et
de feu; et personne ne peut avoir reçu ce baptême sans le
savoir. Tant de membres d'Eglise ne connaissent que le baptême d'eau!
Cependant le grand Précurseur
a dit : "Je vous baptise d'eau pour vous amener à la repentance,
mais celui qui vient après moi est plus grand que moi... Il vous
baptisera du Saint-Esprit et de feu." Hélas! Bien des conducteurs
spirituels ne connaissent pour eux et leurs troupeaux que "le baptême
de Jean".
Malgré tout notre
orgueil ecclésiastique et notre confiance en nous-mêmes,
quelle partie de notre construction résistera à l'épreuve
de feu?
Nous ne pouvons trop affirmer
notre conviction, que tous les obstacles à la vie spirituelle dans
l'Eglise viennent du péché. Vous verrez, dans les chapitres
suivants, comment le Saint-Esprit amène à la lumière
les interdits de toutes sortes. Ce qui est effroyable, c'est que les péchés
qui se trouvent hors de l'Eglise existent aussi, bien qu'en moindre proportion,
dans l'Eglise elle-même. Pour que des jugements trop sévères
ne soient pas portés, nous ferons remarquer que beaucoup d'Eglises
chinoises ne sont séparées du paganisme que par une génération
à peine. Mais n'ayons pas l'illusion de croire que tout est pour
le mieux dans nos vieilles Eglises d'Europe ou d'Amérique. C'est
le péché individuel des membres de l'Eglise qui contriste
et éteint l'Esprit. Nous perdrions beaucoup de notre propre justice
si nous découvrions que l'orgueil, la jalousie, le mauvais caractère,
la médisance, l'avarice, l'envie et les choses de cette sorte sont
aussi haïssables aux yeux de Dieu que ce qu'on appelle les péchés
grossiers. Tout péché dans le croyant, gâte l'œuvre
rédemptrice du Christ. Les cris les plus perçants que j'ai
jamais entendus, ont été poussés par des chrétiens
chinois, qui se sont aperçus qu'ils avaient crucifié à
nouveau le Seigneur de gloire. "Non, la main de l'Eternel n'est pas trop
courte pour sauver, ni son oreille trop dure pour entendre. Mais ce sont
vos crimes qui mettent une séparation entre vous et votre Dieu,
ce sont vos péchés qui vous cachent sa face et l'empêchent
de vous écouter." (Esaïe 5911-2).
L'impureté, les crimes
des Eglises ne peuvent être balayés que par l'Esprit et par
le feu.
A cause de l'importance donnée
dans ce livre à la confession du péché, il sera bon
que je donne mes vues personnelles à ce sujet.
Il y a quelques années,
j'allais commencer une série de réunions dans un centre
religieux important en Chine. Une dame missionnaire vint me voir pour
m'exposer ce qu'elle appelait "un plan sûr pour émouvoir
les âmes". Elle voulait que je commence par une confession de mes
péchés; elle suivrait, puis je persuaderais les autres missionnaires
d'en faire autant. Les pasteurs chinois, naturellement, continueraient
et ainsi, affirmait-elle, tous s'effondreraient.
Je lui répondis que
le Seigneur ne m'avait pas fait voir les choses de cette façon.
"Si j'ai des interdits, lui
dis-je, ils sont un obstacle
à Honan (d'où je viens), où je suis connu; il en
est de même dans votre cas. Donc, mieux vaut retourner au plus tôt
dans nos champs respectifs et renoncer à nos interdits. Confesser
nos péchés devant cet auditoire qui ne nous connaît
pas, serait perdre un temps précieux. De plus, qui suis-je pour
encourager ces missionnaires à confesser leurs péchés,
alors que peut-être ils vivent plus près de Dieu que moi?
L'Esprit ne désire pas que je sois un détective. Si les
missionnaires ont des interdits, le Saint-Esprit les obligera bien à
les balayer, c'est son affaire et non la nôtre." Je n'ai jamais
rien vu de plus émouvant que le spectacle de ces missionnaires;
à la dernière réunion, ils s'humilièrent devant
l'auditoire, et confessèrent les péchés qui entravaient
leur vie chrétienne. Nous avons le sentiment absolu que les péchés
commis avant la conversion sont sous le sang du Fils de Dieu et n'ont
pas à être confessés publiquement. Le faire, ce serait
amener le déshonneur sur le sacrifice du Calvaire. Nous avons entendu
des membres d'Eglise confesser des péchés commis avant qu'ils
se fussent joints à l'Eglise, mais ils n'étaient pas réellement
nés de nouveau en devenant membres. L'humiliation, inspirée
par le Saint-Esprit, qui accompagnait leurs confessions, remplissait d'une
crainte respectueuse l'auditoire, fortement ému. De plus, d'après
nos observations, nous concluons qu'il doit y avoir d'abord parmi les
vrais enfants de Dieu une profonde conviction de péché avant
de s'attendre à ce que les autres soient touchés. D'après
notre propre expérience, nous pouvons déclarer que chaque
fois que cette condition préliminaire a été remplie,
les inconvertis de l'auditoire se sont complètement effondrés
devant Dieu. Il n'y aurait pas eu de Pentecôte, si, tout d'abord,
les cent-vingt dans la Chambre Haute n'étaient pas arrivés
à ce stade. Les chrétiens chinois parlent de ce travail
de l'Esprit comme d'un jugement, mais c'est un "hsiao shen pan" (petit
jugement), car le chemin est encore ouvert à celui qui confesse
ses péchés pour obtenir la purification par le sang précieux
du Christ.
Nous croyons aussi qu'en
ce qui concerne le péché secret, c'est-à-dire le
péché connu par l'âme seule et par Dieu, il suffit
généralement pour obtenir le pardon, de le confesser dans
la prière secrète. Nous disons en général,
parce que nous avons vu beaucoup de cas de pasteurs et conducteurs de
l'Eglise pour lesquels la confession secrète n'avait pas suffi.
Leur confession angoissée et publique montrait clairement que pour
eux, du moins, il n'y avait que ce moyen d'être soulagé.
Quant au péché
commis contre une personne particulière, l'Ecriture est parfaitement
explicite. "Si tu présentes ton offrande à J'autel, et que
là tu te souviennes que ton frère a quelque chose contre
toi, laisse là ton offrande devant l'autel et va d'abord te réconcilier
avec ton frère, puis viens présenter ton offrande" (Matthieu
5/24-25).
Il est inutile de prier si
nous savons que nous avons fait du tort à quelqu'un. Réparons
d'abord, avant d'oser nous approcher de Dieu en public ou en secret. Je
crois que le Réveil éclaterait dans presque toutes les Eglises,
si cette règle était suivie. Enfin, pour les péché
publics, l'expérience nous a montré qu'on ne pouvait en
être débarrassés que par la confession publique. Ceci,
il est vrai, signifie la crucifixion de la chair; mais par notre désobéissance
volontaire, nous avons exposé à la honte ouvertement notre
Seigneur de gloire, et cette confession est le prix que nous devons payer.
Il y a quelques années,
nous adressant à une assemblée nombreuse de pasteurs et
d'anciens au Canada, nous insistâmes sur le fait que Dieu voulait
que nous mettions l'accent sur le péché.
Quelques heures après,
à une réunion de pasteurs, le sujet revint sur le tapis,
et on me dit que la majorité des assistants, après une bonne
discussion, affirmèrent, au contraire, qu'on avait trop insisté
sur la question du péché. Mais la pensée de l'homme
n'est pas celle de Dieu. Le Calvaire est l'accent mis par Dieu sur le
péché. Sûrement, nous ne pouvons lui donner trop d'importance,
puisque le Fils sans péché a dû être fait péché
pour nous. N'est-ce pas John Wesley qui murmura, au moment d'entrer dans
la présence de son divin Roi : "Je suis le premier des pécheurs,
mais Jésus mourut pour moi !"
Nous parlerons dans le cours
de cet ouvrage, des possessions démoniaques. Nous savons que ce
n'est pas un sujet à la mode. Quand le livre du docteur Nevius,
intitulé "Demon Possession", parut, l'éditeur d'un journal
bien connu écrivit : "Voilà un nouvel exemple de la manière
dont quelques hommes laissent facilement aller leur raison à la
dérive". Cependant, ce que nous avons vu de nos yeux nous amène
à la conclusion que ce n'est pas le docteur Nevius, mais l'éditeur,
qui a trop facilement laissé sa raison aller à la dérive.
Citons l'opinion du docteur
Schofield, médecin spécialiste renommé de Londres:
"Je pense, écrit-il, que ceux qui connaissent l'Orient ne peuvent
mettre en doute que Satan y règne sans conteste... L'aliénation
mentale est un mot général qui couvre toute espèce
de folie, mais il couvre davantage encore. Mon expérience même
en Angleterre, et celle de tous les hommes expérimentés
ayant affaire aux maladies mentales, prouve sans aucun doute qu'ici et
là nous rencontrons des cas de gens "possédés" de
quelque esprit malin. Je suis un de ceux qui croient à l'existence
de cas semblables. Je crois de plus que ces démons peuvent être
chassés et l'ont été, leurs victimes étant
revenues à leur état normal" (1) [Helen S. Dyer : Réveil
aux Indes, p. 14].
Plusieurs personnes ont qualifié
le travail que Dieu m'a confié comme étant de simple émotivité.
Nous ne nous défendrons qu'en citant quelques extraits de lettres
reçues par des amis, au Canada, écrites par des missionnaires
en Mandchourie au cours du Réveil de 1908.
"Jusqu'à présent
j'avais en horreur les manifestations religieuses, hystériques
et émotives. Les premières crises de larmes que je vis se
produire chez des hommes me déplurent extrêmement. Je ne
savais pas ce qu'elles cachaient. Enfin, il devint évident pour
moi que l'Esprit de Dieu seul travaillait dans les cœurs".
"Souvenez-vous que le Chinois
est l'homme qui craint le plus l'opinion publique, qu'il y avait là
des hommes et même des femmes qui bravaient tous les préjugés,
violant la tradition séculaire de ne jamais s'humilier, ni s'abaisser
en public. Vous pouvez vous imaginer l'étonnement, l'émerveillement
qui remplissaient le cœur des missionnaires."
"Une puissance est survenue
dans l'Eglise que nous ne pouvions maîtriser, même si nous
le voulions. C'est un miracle que l'impassible Chinois, si plein de propre
justice, arrive à confesser de lui-même des péchés
qu'aucune torture du "Yamen" (justice chinoise) n'aurait pu lui arracher;
qu'un Chinois s'abaisse au point de réclamer en pleurant les prières
de ses frères en la foi, cela est impossible à expliquer
au point de vue humain."
"Nous sommes confondus par
la merveille de ce Réveil... Nous avons entendu parler de ceux
du pays de Galles, aux Indes et même chez nos proches voisins, en
Corée, mais quand la bénédiction tombe si richement,
si pleinement comme elle le fait au milieu de nous quelques jours, quelle
différence !"
"Vous vous dites peut-être
que c'est de l'hystérie religieuse. Nous l'avons cru aussi, quand
nous avons entendu parler de Réveil. Mais nous sommes ici soixante
presbytériens écossais et irlandais qui en avons été
les témoins. Beaucoup d'entre nous en ont eu peur au début,
mais après avoir vu ce qui s'est passé ici chaque jour de
la semaine dernière, il n'y a certainement qu'une explication :
c'est que l'Esprit de Dieu se manifeste d'une manière inimaginable.
Nous n'avons pas le droit de critiquer. Nous ne l'osons pas. Un des articles
du Credo qui revient à nos mémoires dans toute sa solennité
est celui-ci: "Je crois au Saint-Esprit" .
CHAPITRE II
Préparation intensive
En automne 1901, après
m'être remis des effets terribles de la révolte des Boxers,
je commençai, en rentrant en Chine, à être de plus
en plus mécontent des résultats de mon travail. Dans mes
premières années de ministère, je m'étais
consolé de mes insuccès, en pensant que les semailles devaient
précéder la moisson, et que celle-ci viendrait en son temps.
Mais la moisson, au bout de treize ans de travail, me semblait plus loin
que jamais. Je sentais qu'une bénédiction bien plus grande
m'attendait, si seulement j'étais capable d'en avoir la vision,
et d'avoir la foi pour la saisir. A mon esprit revenaient constamment
ces paroles : "En vérité, en vérité, je vous
le dis, celui qui croit en moi fera les œuvres que je fais et il en fera
même de plus grandes..."
Je sentais profondément
qu'il était impossible de croire que ce que je faisais année
après année équivalait aux "œuvres plus grandes".
Mécontent, inquiet, j'étudiais plus attentivement les Ecritures.
Tout passage portant sur la question de la puissance était pour
moi vie et respiration. J'avais dans ma bibliothèque de nombreux
livres sur le Réveil. Je les lus et les relus. Cela devenait une
telle obsession, que ma femme avait peur que ma raison ne succombât.
Les récits du Réveil gallois de 1904 et 1905 me furent d'un
grand secours. Le Réveil n'était donc pas une chose du passé.
Je me rendis compte, graduellement, que j'avais découvert un filon
d'une richesse infinie.
Un ami travaillant aux Indes,
m'envoya, au cours de l'automne de 1905, des extraits de l'autobiographie
de Finney et, de ses discours de Réveil. Ce fut l'étincelle
qui m'embrasa. "Est-ce qu'un fermier, disait la préface, penserait
à prier pour obtenir une moisson sans avoir d'abord semé
? Pourquoi les chrétiens s'attendraient-ils à une grande
moisson d'âmes, même s'ils la demandent à Dieu, avant
d'avoir rempli d'abord les lois de la récolte spirituelle ?"
Si Finney a raison, me dis-je,
je vais découvrir quelles sont ces lois et je les observerai coûte
que coûte.
Au début de 1906,
alors que j'étais en route pour participer à la campagne
intensive d'évangélisation qui se fait annuellement à
la grande foire idolâtre de Hsun-Hsien, un collègue me prêta
l'autobiographie complète de Finney. Il m'est impossible de dire
ce que ce livre fut pour moi. Nous, les missionnaires, en lûmes
une portion chaque jour tant que dura la foire. C'est à cette foire
que je commençai à voir les premiers signes dans les cœurs
de mes auditeurs de l'action de la puissance suprême. Un jour, tandis
que j'avais pris pour texte, 1 Timothée 2/1 à 7, plusieurs
personnes furent profondément émues. Un évangéliste
murmura avec une crainte respectueuse: "Mais ces gens paraissent émus
comme les auditeurs de Pierre à la Pentecôte." Le même
soir, je parlai devant une salle comble. Mon texte était 1 Pierre
2/24 : "Il a porté lui-même nos péchés en son
corps sur le bois...". La conviction du péché se lisait
sur tous les visages. Quant, à la fin, je demandai des décisions,
l'auditoire entier se leva comme un seul homme en criant : "Nous voulons
suivre ce Jésus qui est mort pour nous !" Je pensais qu'un des
évangélistes allait parler après moi, mais en me
retournant, je les vis tous les dix, debout, sans mouvement, regardant,
étonnés. Tandis que l'un d'eux restait dans la salle pour
parler à la foule, j'allai avec les autres dans une chambre contiguë
pour prier. Pendant quelques minutes ce fut un silence absolu. Tous semblaient
trop frappés de crainte pour parler. Enfin, la voix tremblant d'un
évangéliste s'éleva : "Mes frères, Celui pour
qui nous avons prié si longtemps était présent en
personne parmi nous ce soir. Mais sachons bien que pour qu'Il demeure
avec nous, il faudra que notre manière de vivre soit très
châtiée."
En 1906, en automne, désappointé
par l'état languissant de mes annexes, je projetais une tournée
pour essayer de les réveiller. Mais il y avait cependant entre
le Seigneur et moi une question qui devait être réglée
avant tout. Inutile d'entrer dans les détails; tout ce que je puis
dire, c'est qu'il s'agissait d'un différend entre un collègue
et moi. Je sentais honnêtement que j'étais dans mon droit.
( Ceci est très humain. Dans toute querelle il est toujours sage
de faire la part de chacun). En tout cas, l'impulsion de l'Esprit était
claire. Il fallait que cette affaire fût réglée. Je
répondais toujours à Dieu que la faute était du côté
de mon collègue et non pas du mien; c'est lui qui devait venir
à moi, et non moi qui devais aller à lui. L'Esprit parlait
toujours. "Mais enfin, Seigneur, discutai-je, il est venu dans mon bureau
et s'est accusé avec larmes. La chose n'est-elle pas arrangée
?"
"Hypocrite! semblait-il me
dire, tu sais très bien que vous ne vous aimez pas comme je vous
ai commandé de le faire." Je persistais : "La faute est du côté
de mon collègue, je ne puis rien faire". Alors vint la parole finale
: "Si tu ne règles pas cette question avant de partir pour ta tournée,
tu échoueras, je ne pourrai aller avec toi." Cela m'humilia un
peu. Je n'avais pas du tout envie de faire cette tournée si longue
et si fatigante sans Son aide; je savais bien que seul je serais "comme
battant l'air".
La veille de mon départ,
je devais présider une réunion de prière pour les
chrétiens chinois. Tout le long du chemin, la voix continuait à
me presser: "Va, et arrange cette affaire, pour que je puisse t'accompagner
demain". Je ne voulais pas céder. Je commençai la réunion.
Cela alla bien pendant le premier cantique et la lecture de la Bible.
Mais aussitôt que j'ouvris la bouche pour prier, je ne savais plus
ce que je disais, car l'Esprit me répétait sans cesse :
"Hypocrite ! pourquoi ne règles-tu pas cette affaire ?" Je fus
encore plus troublé pendant ma courte allocution. Finalement à
peu près à la moitié de mon discours, le fardeau
devint si intolérable que je cédai et dis en mon cœur :
"Seigneur, dès la fin de la réunion j'irai régler
cette affaire". Instantanément, quelque chose sembla céder
devant l'auditoire. Mes auditeurs ignoraient ce qui se passait dans mon
cœur, et cependant l'atmosphère fut absolument transformée.
Quand la réunion fut
ouverte à tous, ceux qui voulaient prier se levèrent l'un
après l'autre, mais ne purent qu'éclater en pleurs. Depuis
vingt ans que les missionnaires travaillaient dans le Honan, ils avaient
espéré en vain voir les Chinois verser des larmes de repentir.
La réunion ne se termina
que très tard. Aussitôt qu'il fut possible, je me hâtai
d'aller chez mon collègue pour régler ce qui nous divisait.
Les lumières étaient éteintes, toute la famille était
couchée. Je revins chez moi pour ne pas les déranger. Mais
la chose était en règle. Le lendemain, dès l'aube,
je me mis en route pour l'une de mes annexes. Les résultats de
cette tournée dépassèrent toutes mes espérances.
L'Esprit de Dieu partout se manifesta, jugeant le péché.
Les torts furent réparés, les choses tordues furent redressées.
Je ne pus consacrer qu'une soirée à un certain endroit,
mais tous les auditeurs furent touchés aux larmes. Dans l'année
qui suivit, le nombre des membres de l'Eglise, dans l'une de mes annexes,
fut doublé; dans une autre 54 personnes furent ajoutées
à l'Eglise, et dans une autre, 88.
Quelques mois après
cette première tournée, le monde religieux fut électrisé
par le récit du Réveil en Corée.
Le secrétaire de notre
Société, alors en visite en Chine, le docteur R.P. Mac Kay,
me demanda de l'accompagner en Corée. Inutile de dire avec quelle
joie j'acceptai cette proposition. Le mouvement religieux en Corée,
en me montrant les possibilités illimitées du Réveil
était d'une importance capitale pour moi.
Il est bon de connaître
le Réveil par les récits de la presse, mais quelle différence
cela fait de le voir de ses yeux, d'en respirer l'atmosphère, de
sentir vibrer son cœur dans ces réunions! Je compris en Corée,
avec d'autres, que le Réveil était le plan de Dieu pour
mettre le monde en feu. J'étais depuis bien peu en Corée,
quand je vis la source d'où était né ce grand mouvement.
M. Swollen, de Pingyang, me raconta que les missionnaires de sa station,
méthodistes et presbytériens, après avoir lu des
récits de Réveil aux Indes, avaient pris la décision
de prier chaque jour à midi pour obtenir une grâce semblable.
"Au bout d'un mois, dit M.
Swollen, un frère proposa de cesser ces réunions; car disait-il,
voilà un mois que nous prions et rien ne change. Nous y passons
beaucoup de temps, et sans résultat. Continuons notre travail,
et prions chacun chez nous, à l'heure la plus commode".
Cette proposition semblait
logique. Cependant la majorité décida qu'au lieu d'arrêter
les prières, nous devions au contraire les prolonger. Nous fixâmes
alors l'heure de notre rencontre à 4 heures au lieu de midi, pour
pouvoir prier, s'il le fallait, jusqu'au souper. Nous persévérâmes
jusqu'à ce que, après des mois d'attente, l'exaucement vint".
Ces missionnaires de Pingyang
étaient, autant que je m'en souviens, des gens moyens, comme vous
et moi. Aucun d'eux n'était doué remarquablement. Ils vivaient,
travaillaient, agissaient comme les autres missionnaires. Mais dans la
prière ils étaient différents. Un soir, le docteur
Mac Kay et moi, fûmes invités à la réunion
missionnaire de prière. Je n'avais jamais été si
conscient de la présence divine que ce soir-là.
Ces missionnaires nous portaient
jusqu'au trône même de Dieu. On avait le sentiment qu'ils
parlaient à Dieu face à face. En revenant chez nous, le
docteur Mac Kay resta silencieux un long moment. Je pouvais voir qu'il
était très remué. Enfin, avec une profonde émotion,
il me dit : "Quelle prière stupéfiante! Vous autres, dans
le Honan, vous êtes loin d'atteindre un niveau pareil".
Ce qui me frappa aussi, ce
fut la nature pratique du mouvement. Ce n'était pas une rafale
d'enthousiasme religieux disparaissant avec le vent qui l'a apportée,
bien qu'il y eût naturellement, les manifestations extérieures
qui accompagnent inévitablement des effusions aussi phénoménales
de puissance spirituelle.
Un fait patent, c'est qu'il
y avait là des dizaines de milliers d'hommes et de femmes dont
la vie avait été radicalement transformée par le
feu divin. Je vis de grandes églises contenant 1500 personnes,
si combles qu'il fallut organiser deux réunions; une pour les femmes
et une pour les hommes. Tous étaient presque tragiquement désireux
de répandre "la bonne nouvelle". Même des petits garçons
abordaient dans la rue des grandes personnes pour les supplier d'accepter
Jésus pour Sauveur. Je remarquai encore une chose: c'était
leur extraordinaire générosité. La pauvreté
des Coréens est proverbiale. Cependant un missionnaire me dit qu'il
avait peur de mentionner devant ses fidèles un besoin quelconque,
car ils donnaient tant! Partout existait un véritable culte pour
la Parole de Dieu. Chacun portait sa Bible avec lui, et le merveilleux
esprit de prière pénétrait tout.
Pour retourner à Honan,
le docteur Mac Kay et moi passâmes par la Mandchourie. Puisque Dieu
ne fait pas acception de personnes, j'étais sûr qu'il était
prêt à bénir la Chine comme Il avait béni la
Corée. A Moukden, je racontai, un dimanche matin, à un vaste
auditoire, l'histoire du Réveil coréen. Tous semblaient
profondément émus, et l'on me demanda de revenir en février
de l'année suivante pour tenir une série de réunions
pendant une semaine. A Liaoyang, mon récit fut accueilli de la
même façon, et l'on me fit la même requête. Continuant
vers le Sud, nous arrivâmes à Peitaiho ; cette fois je racontai
mes expériences à un groupe important de missionnaires.
Une impression profonde fut produite. Plusieurs missionnaires résolurent
de se réunir à des heures fixes pour prier jusqu'à
ce que Dieu envoyât à la Chine un Réveil comme celui
de la Corée.
En arrivant à Changthfu,
une lettre des missionnaires de Kikungshan m'attendait. Ils me demandaient
avec instance d'aller leur parler de ce que j'avais vu. Je le fis le dimanche
soir suivant. Je remarquai que j'avais considérablement dépassé
le temps si généreusement mis à ma disposition. Craignant
de finir trop tard, je supprimai le dernier cantique et prononçai
la bénédiction finale. A ma grande surprise, pendant au
moins six minutes, personne ne bougea. Un silence de mort régnait
dans la salle. Graduellement, des sanglots étouffés se firent
entendre. Des missionnaires se levèrent, et en versant d'abondantes
larmes, confessèrent leurs fautes les uns aux autres. Nous ne nous
séparâmes qu'à une heure très tardive.
Nous avions préparé
pour la semaine suivante une conférence avec un programme très
intéressant. Mais quand les missionnaires se rencontrèrent
le lundi matin, ils décidèrent de mettre ce programme de
côté et de continuer à prier et à suivre les
impulsions du Saint-Esprit.
Je n'ai jamais passé
avec nos frères missionnaires en Chine, des jours plus merveilleux.
Avant de nous séparer pour rejoindre nos champs d'activité
situés dans toutes les parties de la Chine, nous décidâmes
que chaque jour, à quatre heures de l'après-midi, nous serions
tous en prière, jusqu'à ce que la bénédiction
divine tombât sur l'Eglise chinoise.
CHAPITRE III
Le début du mouvement en
Mandchourie
Quand je partis en février
1908 pour mon long voyage en Mandchourie, j'y allai avec la conviction
que j'avais de la part de Dieu un message à transmettre à
son peuple. Mais je n'avais pas de méthode. Je ne savais pas comment
diriger un Réveil. Je ne pouvais faire une allocution et laisser
prier les gens, et c'était tout.
Le soir de mon arrivée
à Moukden, je causais, dans mon bureau avec mon hôte missionnaire.
Naturellement, j'étais tendu au plus haut point à la pensée
de ce qui m'attendait; mon hôte, au contraire, semblait spécialement
indifférent à la pensée d'un Réveil. Il choisit
ce soir-là, entre tous, pour m'impressionner par la supériorité
de ses vues théologiques. "Vous savez, Goforth, me dit-il, il y
a un terrible phraseur dans votre Mission. Comment s'appelle-t-il ? Mac...
? "
- " Est-ce Mac Kengie? demandai-je;
mais ce n'est pas possible, car il est loin d'être un phraseur.
Il est considéré comme un des meilleurs théologiens
de la Chine. "
- "Non, me dit-il, ce n'est
pas Mac Kengie; oh, oui, je m'en souviens, c'est Mac Kay."
- "Mais Mac Kay est notre
secrétaire, répliquai-je, et une de ses allocutions serait
appréciée par n'importe quel auditoire. "
- "Eh bien, dit-il, je l'ai
entendu à la conférence de Shangaï. Sa théologie,
mon cher, est aussi vieille que le déluge!
- "Arrêtons-nous, dis-je,
car ma théologie est aussi vieille que la sienne. De fait, elle
est aussi ancienne que le Tout-Puissant Lui-même! "
J'appris aussi que la femme
de mon hôte n'était pas en sympathie avec mes réunions,
et était partie en visite chez une de ses amies avant mon arrivée.
Je ne pus pas m'empêcher de penser que, si ce foyer était
un échantillon de ceux des autres missionnaires, les perspectives
d'un Réveil étaient bien lointaines.
D'autres désappointements
m'attendaient. Je n'avais accepté l'invitation qui m'avait été
faite l'année précédente, qu'à la condition
que les deux branches de l'Eglise Presbytérienne l'Irlandaise et
l'Ecossaise s'uniraient pour mes réunions, et que celles-ci se
seraient préparées par la prière.
Imaginez ma déception,
quand j'appris qu'aucune réunion supplémentaire de prières
n'avait eu lieu. La goutte qui fit déborder le vase et qui fit
chanceler ma foi déjà défaillante, fut d'apprendre
que les deux branches de l'Eglise presbytérienne ne s'étaient
pas unies. Je montai dans ma chambre; m'agenouillant près de mon
lit et incapable de retenir mes larmes, je criai à Dieu : "A quoi
bon ma venue? Ces gens ne te cherchent pas. Ils ne désirent aucune
bénédiction. Que puis-je faire?" Une voix me sembla me répondre
immédiatement : "Est-ce ton œuvre ou la mienne? Ne puis-je pas
agir en souverain? Invoque-moi, et je te répondrai; je t'annoncerai
de grandes choses, des choses cachées que tu ne connais pas" (Jérémie
33/3).
De bonne heure le lendemain,
un des anciens vint me voir. Aussitôt qu'il fut seul avec moi, il
éclata en pleurs : "L'année des Boxers, me dit-il, j'étais
trésorier de l'Eglise. Les Boxers vinrent et détruisirent
tout, même les livres de comptes. Je savais donc que je pouvais
mentir sans danger. Je jurai que je n'avais jamais reçu certains
fonds qui m'avaient été confiés. Depuis, je me suis
servi de ces fonds pour mes affaires. Hier, pendant vos allocutions, j'étais
comme fouillé par une flamme. Je n'ai pas fermé l'œil de
la nuit. La seule chose qu'il me reste à faire pour me soulager,
c'est de confesser mon péché devant l'Eglise et de faire
pleine et entière restitution".
Après mon exhortation
ce matin-là, l'ancien se leva devant tous et mit à nu son
péché. L'effet fut instantané. Un autre membre poussa
un cri perçant, mais quelque chose sembla le retenir, et il se
tut sans rien confesser. Plusieurs alors prièrent successivement
et se confessèrent en pleurant.
Pendant toute la troisième
journée, le mouvement augmenta d'intensité. Mon hôte,
le missionnaire, me dit : "Ceci me stupéfie. Cela ressemble au
Réveil écossais de 1859. Ne pourriez-vous pas renoncer à
vos autres allocutions et commencer des services d'actions de grâce?
Si je comprends bien la situation, répondis-je, nous sommes encore
loin des actions de grâce. Il y a encore beaucoup de péchés
qui doivent venir à la lumière. Laissez-moi continuer mes
exhortations, et ensuite vous tiendrez tous les services d'actions de
grâce que vous voudrez."
Le quatrième matin,
un auditoire exceptionnellement nombreux envahit la salle. Les gens paraissaient
être dans une attente anxieuse. Pendant le chant qui précéda
mon allocution, une voix intérieure me dit : "Le succès
de ces réunions est phénoménal. Cela va te faire
une réputation extraordinaire, non seulement en Chine, mais dans
le monde entier." La chair en moi répondit, et un sentiment de
satisfaction m'envahit. Immédiatement, je sentis que c'était
l'adversaire qui était à l'œuvre de la façon la plus
subtile, en me suggérant de partager la gloire avec le Seigneur
Jésus. Combattant la tentation, je dis : "Satan, sache une fois
pour toutes que je suis prêt à devenir l'atome le plus insignifiant,
pourvu que mon Maître soit glorifié comme Il se doit." Le
cantique étant achevé, je me levai pour parler.
Pendant toute ma prédication,
je sentis avec intensité la présence de Dieu. En concluant
je dis à l'auditoire : "Maintenant, vous pouvez prier. " Immédiatement,
un homme s'avança jusque devant l'estrade, la tête basse,
le visage inondé de larmes. C'était l'ancien qui, deux jours
auparavant, avait poussé un cri perçant. Comme poussé
par une puissance incoercible, il s'écria : "J'ai commis adultère.
J'ai essayé trois fois d'empoisonner ma femme !" Il arracha alors
les bracelets d'or de ses poignets et la bague d'or qu'il avait à
son doigt, et les plaça dans le plateau de la collecte en disant
: "Qu'ai-je besoin de ces futilités?" Il prit sa carte d'ancien
et la mit en morceaux qu'il jeta sur le plancher. "Vous avez tous de mes
cartes chez vous, dit-il à l'auditoire Ayez la bonté de
les déchirer. J'ai profané ma charge sacrée, je donne
ma démission d'ancien."
Après cette confession
émouvante, personne ne bougea pendant plusieurs minutes. Puis,
l'un après l'autre, tous les anciens se levèrent et offrirent
leur démission. Le résumé de leurs confessions était
ceci : "Bien que nous n'ayons pas péché comme notre frère,
cependant nous sommes indignes, nous aussi, de conserver notre charge."
Les diacres, un par un, se levèrent, et donnèrent aussi
leur démission. "Nous aussi sommes indignes" confessèrent-ils.
Depuis plusieurs jours, j'avais
remarqué que le plancher, devant le pasteur indigène, était
souvent mouillé de larmes. Il se leva, et la voix brisée
nous dit : "Si l'Eglise est dans ce triste état, c'est que je n'ai
pas été ce qu'il aurait fallu. Je ne suis pas digne d'être
votre pasteur. Voilà ma démission."
Une scène des plus
touchantes suivit. De différents côtés des voix criaient
: "Non, non, cher pasteur, cela va bien. Nous vous réélisons."
Tout l'auditoire confirma ces paroles à grands cris, jusqu'à
ce qu'enfin le pauvre pénitent fut persuadé que son troupeau
lui rendait sa pleine confiance. L'auditoire réclama que les anciens
se levassent à leur tour, et un vote unanime leur rendit la confiance
de l'Eglise. Ce fut ensuite le tour des diacres. L'harmonie était
rétablie. Le même soir, l'ancien dont la confession avait
été suivie de fruits si merveilleux, fut vivement pris à
partie par un de ses amis. "Qui vous a obligé à vous avilir
publiquement, ainsi que votre famille?" lui demanda-t-il. Mais il répondit:
"Pouvais-je m'en empêcher ?"
Ce fut une grande joie pour
moi de voir le changement que l'attitude de mon hôte subit pendant
ces réunions. Un matin, tandis qu'on priait pour différentes
personnes, il se précipita en avant en disant : "Priez pour nous,
les missionnaires, nous en avons plus besoin que n'importe qui." Sa femme,
si indifférente, revint de chez son amie plusieurs jours avant
la fin de la campagne. Ce n'était pas trop tard, son cœur fut touché,
et elle devint plus consacrée même que son mari.
Le dernier jour, le pasteur
indigène dit à ses gens : "Vous savez combien de nos anciens
et de nos membres ont rétrogradé. Oh ! s'il y avait moyen
de les ramener !" A ces mots l'auditoire se leva comme un seul homme et
tous s'unirent pour prier en faveur des brebis égarées.
On pria comme si ces âmes étaient celles auxquelles on tenait
le plus au monde, comme une mère prierait pour son fils prodigue.
Au cours de cette même année, des centaines de rétrogrades
revinrent au bercail. La plupart confessèrent qu'ils ne pensaient
pas avoir jamais été convertis auparavant.
Un des anciens de l'Eglise
de Liaoyang, peu avant mon arrivée, avait déménagé
un dimanche. Le missionnaire était allé le voir, et l'avait
repris pour avoir donné aux fidèles un si mauvais exemple.
L'ancien s'était mis en colère, affirmant qu'il n'avait
eu que le dimanche pour faire son déménagement. Le matin
du second jour de ma série de réunions, il s'effondra devant
tous et confessa son péché. Il aurait eu bien le temps de
déménager pendant la semaine, mais il avait voulu mettre
à profit le dimanche. Peu après mon départ, cet ancien
tint des réunions pour les élèves du lycée
et obtint d'extraordinaires résultats. Après la confession
de cet ancien, le deuxième jour, la pression du Saint-Esprit augmenta
rapidement. Un matin, le cinquième jour, un vieux rétrograde
s'écria angoissé : "Je l'ai tué !" Il confessa son
péché. Il était brouillé à mort avec
un de ses voisins. Celui-ci étant tombé malade, notre rétrograde,
qui était médecin, fut appelé pour lui ordonner un
remède. Il lui ordonna du poison qui le tua. L'effet de cette révélation
peut plus facilement s'imaginer que se décrire. En quelques minutes,
l'assemblée entière semblait être les affres du jugement.
De tous côtés partaient des confessions et des demandes de
pardon.
En revenant à la maison,
après la dernière réunion, Monsieur Douglas, le missionnaire
principal, me dit : "Je suis courbé dans la poussière. C'est
le Réveil écossais de 1859, qui se reproduit sous mes yeux.
Je n'y étais pas, mais mon père m'en a souvent parlé.
Il m'a raconté que les gens travaillaient tout le jour aux champs,
rentraient en hâte pour manger un morceau et repartaient à
l'Eglise où ils restaient jusqu'à minuit. Mais ma faible
foi ne me permettait pas de m'attendre, ici, à quelque chose de
semblable". Il me tendit une lettre qu'il avait reçue depuis plusieurs
semaines, du docteur Moffat, pasteur en Corée : "Je veux que vous
sachiez, écrivait-il, que pendant toute la série à
Liaoyang, mes fidèles, qui sont trois mille, prieront pour que
les plus riches bénédictions vous soient accordées".
Le Réveil de Liaoyang
fut le début d'un mouvement qui se propagea dans tout le pays environnant.
Des groupes de chrétiens réveillés annonçaient
ici et là l'Evangile rédempteur. Dans une des annexes, un
chrétien avait un fils de très mauvaise réputation.
Après la réunion tenue par un de ces groupes, son cœur fut
brisé, il se confessa et se convertit. Cela eut un effet remarquable
dans le village. Des païens se disaient entre eux : "Le Dieu des
chrétiens est venu. Il est même venu chez ce mauvais garnement
et a chassé de lui toute sa méchanceté. Il est maintenant
comme les autres chrétiens. Si vous ne voulez pas aller dans la
même voie, ne vous approchez pas d'eux".
Dans ce même village
vivait un chrétien qui, bien des années auparavant, avait
emprunté à un de ses voisins païens une somme considérable.
Il n'avait nullement l'intention, avoua-t-il plus tard, de rembourser.
Mais un des résultats du travail d'un de ces groupes de réveil
fut la repentance de cet homme. Il calcula les intérêts composés
de sa dette, alla chez son créancier et lui paya tout.
Dans un autre village de
la même région, il y avait un homme renommé pour sa
chance phénoménale au jeu. Un jour, cet homme sella son
âne et partit pour aller réclamer de l'argent que quelques
personnes lui devaient. Il était à peine arrivé à
la lisière du village que l'âne s'arrêta. Le joueur
le frappa à coups de bâton, à coups de pied; l'âne
ne bougea pas. Il ne voulait pas aller vers le nord! L'homme réfléchit
que, vers le sud, il avait aussi des débiteurs. Il fit tourner
son âne qui se mit en route sans résistance. Tout alla bien
jusqu'au croisement de deux routes dont l'une allait au Sud-Est et l'autre
au Sud-Ouest. Le joueur avait l'intention de se rendre dans un village
du Sud-Ouest et c'est sur la route qui y mène qu'il voulut faire
avancer son âne. Mais la bête en avait décidé
autrement. Le maître comprit que, pour qu'il bougeât, il fallait
prendre la route du Sud-Est, car ni les cris, ni les coups ne le faisaient
bouger. "Après tout, fais à ta tête, dit l'homme excédé,
du reste, si je ne me trompe, il y a justement quelqu'un qui me doit de
l'argent par là !" Ils continuèrent leur route. Ils arrivèrent
dans un village. Ils longèrent la grande rue jusqu'à ce
qu'ils arrivassent devant une petite église chrétienne.
L'âne alors s'arrêta, et aucun effort de son maître
ne put le faire avancer. En désespoir de cause, le joueur mit pied
à terre. Quelques chrétiens qui avaient été
aux réunions de Liaoyang avaient justement une assemblée
à ce moment-là. Le joueur entendit des chants. Poussé
par la curiosité, il entra. La puissance de Dieu était à
l'œuvre. Il entendit un homme confesser ses péchés avec
larmes. Un autre, la figure rayonnante parla de la paix et de la joie
qui remplissaient son cœur. Bientôt, la conviction du péché
entra dans ce joueur. Il se leva, confessa ses fautes et raconta comment
Dieu l'avait amené dans la salle : "Comment pourrais-je ne pas
croire, s'écria-t-il, que c'est la voix de Dieu ?"
Conclusion :
Les conditions indispensables du
Réveil
Un missionnaire me dit un
jour, comme en guise d'excuse : "J'ai toujours désiré un
Réveil, mais ma station est si loin de tout, que je n'ai jamais
pu y faire venir un évangéliste". Comme si l'Esprit de Dieu
n'agissait que par quelques privilégiés! Nous sommes convaincus,
nous l'affirmons avec pleine conviction, que le Réveil peut avoir
quand et où nous voulons. Ce prince des évangélistes,
Finney, croyait que tout groupe de chrétiens qui fait de cœur et
sans réserve la volonté de Dieu, pouvait avoir un Réveil.
Moody affirmait constamment que la Pentecôte n'était que
le spécimen de ce que voulait faire l'Esprit.
J'espère que de la
lecture de ces pages, le lecteur ne conclura pas que l'Orient est mieux
prédisposé au Réveil que les autres parties du monde;
ce serait un grave malentendu. Nous avons vu, dans nos propres pays, des
auditoires remués, exactement comme ceux de la Chine. Il est vrai
que cela prend généralement plus de temps. Mais qu'il y
faille un jour ou une quinzaine, le principe est le même : n'importe
quel groupe de chrétiens qui le désire peut recevoir la
pleine bénédiction de la Pentecôte.
En lisant la Parole de Dieu,
il nous semble inconcevable que le Saint-Esprit veuille retarder son oeuvre
d'un jour. Nous pouvons être sûrs que, quand il ne peut pas
déployer sa puissance, c'est toujours parce que l'homme n'a ni
la foi, ni l'obéissance voulues. Si Dieu le Saint-Esprit ne glorifie
pas Jésus dans le monde aujourd'hui, comme à la Pentecôte,
c'est nous qui sommes à blâmer. Après tout, qu'est-ce
que le Réveil, sinon l'Esprit de Dieu possédant absolument
notre vie? Le Réveil est donc toujours possible quand l'homme se
donne entièrement à Dieu. La résistance au Saint-Esprit
est le seul péché qui puisse empêcher le Réveil.
Mais sommes-nous prêts
à recevoir le Saint-Esprit? Apprécions-nous à leur
valeur et le don et le donateur? Voulez-vous payer le prix d'un Réveil
par le Saint-Esprit? Prenez la prière, par exemple. L'histoire
des Réveils montre que tous ont été déclenchés
par la prière. Cependant n'est-ce pas justement là que beaucoup
d'entre nous tremblent et hésitent devant le prix à payer?
La Bible ne nous dit pas grand chose de ce qui s'est passé dans
la Chambre haute entre l'Ascension et la Pentecôte; mais nous sommes
certains que les disciples étaient avares des minutes qu'ils ne
passaient pas à genoux.
Que d'interdits, de scories,
de déchets à faire disparaître!
Le miracle de la Pentecôte
fut la meilleure preuve de l'œuvre de purification qui s'était
faite dans la Chambre haute. Nous savons que toutes les effusions du Saint-Esprit
ont toujours été étroitement liées à
la prière. "Quand ils eurent prié", nous dit Luc, "le lieu
où ils étaient assemblés trembla; ils furent tous
remplis du Saint-Esprit" (Actes 4/31).
Les grands mouvements de
la Réforme ont été en grande partie les résultats
de la prière. On dit de Luther qu'il obtenait de Dieu, en priant,
tout ce qu'il voulait. Marie Stuart craignait plus les prières
de John Knox que toutes les armées de la reine Elizabeth. L'œuvre
magnifique du Saint-Esprit, qui transforma chez les Moraves, en 1727,
toutes les discordes en un grand amour, fit d'eux la plus grande force
missionnaire du monde. Cette œuvre eut sa source dans la prière.
"Y a-t-il jamais eu dans l'histoire de l'Eglise, écrit l'évêque
Hasse, une réunion de prière qui ait duré cent ans?
Les Moraves la commencèrent à Herrnhute en 1727; ils l'appelèrent
l'intercession d'une heure. Se relayant jour et nuit, un frère
ou une sœur était toujours en prière. L'objet principal
de ces requêtes était l'œuvre de Dieu par l'Eglise. La prière
mène l'action. Dans ce cas-là, elle créa un désir
ardent, chez les Moraves, de porter le salut de Christ aux païens.
Ce fut le commencement des missions modernes. De l'Eglise d'un petit village,
il sortit, en vingt-cinq ans, plus de cent missionnaires. Nous ne trouverons
nulle part et à aucune époque, aucun mouvement qui égale
celui-là" (1) [John Greenfield : Power from on High, pp.
25, 26.]
Mais, pourquoi le mouvement
morave n'aurait-il pas aujourd'hui sa contrepartie? Pouvons-nous concevoir
que l'Esprit de Dieu se lasse? Nous pouvons être sûrs que
la bénédiction nous attend, si nous consentons seulement
à nous agenouiller et à la recevoir.
Le trait le plus saillant
du Réveil wesleyen, ce fut l'accent que ses chefs mirent sur la
prière. Leur habitude était de prier chaque matin de 4 à
5 heures et de 5 à 6 heures le soir. De grands croyants, William
Bramwell par exemple, passaient la moitié de la nuit en prière,
puis parcouraient une région, brûlants comme une flamme de
feu! Si seulement les millions de Méthodistes d'aujourd'hui donnaient
à la prière la valeur que lui donnaient leurs grands ancêtres,
quels miracles ne se produiraient-ils pas!
Finney comptait plus, pour
produire le Réveil, sur les prières de Nash et de Clary
que sur sa propre irrésistible logique. Nous sommes si habitués
à l'état laodicéen de l'Eglise que l'influence toute-puissante
de la prière, au temps de Finney, nous stupéfie. Pensez
un peu : quarante pasteurs et missionnaires furent appelés par
Dieu, et envoyés dans son champ, comme résultat des prières
faites pendant un Réveil dans l'Ecole supérieure de Rochester!
En 1857, Finney voyait cinquante mille âmes par semaine se décider
à se donner à Dieu. Dans beaucoup de villes, on ne trouvait
pas d'assez grande salle pour y tenir les réunions de prière.
Ce fut alors que commença celle de Fulton Street, à New-York,
dans une salle annexe d'une église. En quelques semaines, l'église
elle-même était devenue trop petite, et le surplus des auditeurs
remplit d'autres églises voisines.
En 1858, Spurgeon réunit
sa grande congrégation et lui dit : "L'Esprit de Dieu sauve en
ce moment des multitudes d'âmes aux Etats-Unis. Comme Dieu ne fait
acception de personnes, nous allons lui demander les mêmes bénédictions
ici". La réponse, ce fut le Réveil de 1859.
M. Moody, assure-t-on, n'acceptait
pas d'invitation à tenir une série de réunions, sans
faire promettre qu'elle serait préparée par la prière.
Au Sud du Pays de Galles, peu avant le grand Réveil de 1904, trois
cents réunions de prière avaient été fondées.
En fait, le Pays de Galles tout entier devint comme une immense réunion
de prière. Le résultat fut qu'en deux mois, soixante-dix
mille âmes s'étaient tournées vers Dieu.
A Calcutta, en 1902, deux
missionnaires avaient entendu le docteur Torrey parler sur la prière.
Elles en furent si frappées qu'en rentrant auprès de leurs
paroissiens à Khassa, leur grand sujet fut la prière. Le
résultat ne se fit pas attendre : au printemps de 1905, les Khassiens
priaient tous. Le Réveil était inévitable. En quelques
mois, huit mille convertis furent ajoutés à l'Eglise, dans
cette partie de l'Inde.
Dans un de nos premiers chapitres,
nous avons raconté comment le grand Réveil en Corée,
en 1907, fut le fruit de la prière. Nous sommes convaincus aussi
que l'origine de tous les Réveils dont nous avons été
témoins en Chine fut: la prière.
Après une série
de réunions spécialement émouvantes, un missionnaire
me dit : "Si le Seigneur a tant accordé à nos prières,
quoi qu'elles aient été si peu nombreuses, que n'aurions-nous
pas obtenu, si nous avions prié davantage ?"
"Quel est le secret du Réveil?
" demandait-on à un grand évangéliste. "Il n'yen
a pas, répondit-il, il vient toujours en réponse à
la prière".
Nous affirmons aussi que
nous ne pouvons pas compter sur un Réveil général,
encerclant le globe entier par le Saint-Esprit, à moins de revenir
tout d'abord à la Bible. Les doutes émis sur la Parole de
Dieu déshonorent absolument son auteur. Quelle douleur doit être
la sienne, quand il voit si peu estimé par les hommes le Livre
qui seul rend témoignage à son Fils!
Si la Bible n'est pas pour
nous, en toute sincérité, la Parole même de Dieu,
nos prières ne sont que moquerie et dérision. Il n'y a jamais
eu de Réveil là où n'existaient pas des hommes et
des femmes croyant de tout leur cœur à la Parole de leur Dieu et
s'appuyant sur ses promesses.
L'épée de l'Esprit
qui est la Parole de Dieu, est la seule arme qui ait jamais été
utilisée avec puissance dans le Réveil. La Parole de Dieu
est toujours, pour celui qui croit en ce qu'elle dit sur elle-même,
une épée, un feu, un marteau qui brise le roc.
Dès que Luther eut
traduit la Bible en allemand, l'Allemagne fut perdue pour Rome. Moody
n'avait pas beaucoup d'instruction, mais il connaissait sa Bible, et il
est certain que le monde n'a jamais connu et ne connaîtra peut-être
jamais son égal comme gagneur d'âmes.
Lorsque j'étais étudiant,
à Toronto, ma seule arme dans les prisons et les bas-fonds que
je visitais, était la Bible. En Chine, j'ai souvent fait trente-cinq
à quarante allocutions par semaine, qui n'étaient, somme
toute, que des paraphrases de la Parole de Dieu. Je puis affirmer que
pendant mes quarante et un ans de ministère, je ne me suis jamais
adressé à un auditoire de Chinois sans avoir la Bible ouverte
devant moi; cela me permettait d'affirmer : "Ainsi dit l'Eternel". Croyant
que la simple prédication de l'Evangile suffisait pour amener des
âmes à Christ, j'ai toujours agi en conséquence. Je
n'ai jamais été déçu. Mon collègue
chinois, un des hommes les plus consacrés que j'aie jamais connus,
fut sauvé d'une vie de péché et de vices par la première
allocution sur l'Evangile qu'il m'entendit prononcer.
Ce que je regrette le plus,
en atteignant mes soixante-dix ans, c'est de ne pas avoir consacré
plus de temps à l'étude de la Bible. Cependant, en moins
de dix-neuf ans, j'ai lu tout le Nouveau Testament chinois cinquante-cinq
fois. Cet éminent professeur de la Bible, le docteur Campbell-Morgan,
déclare qu'il n'a jamais osé professer sur un livre de la
Bible, avant de l'avoir lu au moins cinquante fois.
Il y a quelques années,
un Monsieur qui était .à la Convention de Keswick y prit
un tel amour pour la BIble, qu'il la lut ensuite douze fois en trois ans.
Vous pensez peut-être que c'était un homme de loisir? Nullement,
c'était un ouvrier qui partait chaque matin à 5 h 30 pour
son usine.
La Bible n'était pas
aussi négligée qu'aujourd'hui, quand les grands Réveils
de 1857-59 éclatèrent en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis.
Elle n'était pas si abandonnée au temps de Moody. Les lettrés
chinois, sous la dynastie mandchoue, devaient savoir par cœur leurs grands
classiques. Comment les lettrés des pays soi-disant chrétiens
traitent-ils le plus grand des classiques?
Il est tragique de voir combien
peu les représentants du Seigneur Jésus en Chine connaissent
Sa Parole. Il y a trente ans, l'idéal d'un missionnaire était
de connaître assez sa Bible pour ne pas avoir besoin de transporter
avec lui sa Concordance. L'indifférence pour la Parole de Dieu,
que professent actuellement beaucoup de missionnaires, viendrait-elle
de ce qu'ils ont découvert un meilleur moyen de répondre
aux besoins spirituels d'un monde pécheur ?
Enfin, la grande raison du
Réveil doit être le désir d'exalter dans nos cœurs
Jésus-Christ comme Roi des rois et Seigneur des seigneurs. Le Christ
est pareil au Mont Everest, qui domine l'immense plaine. Si nous voulons
qu'Il habite en nous, il faut qu'Il prenne toute la place. Toute idole
doit être détruite; Isaac, le bien-aimé, doit être
placé sur l'autel. Il faut refuser au moi jusqu'à la moindre
satisfaction. C'est alors seulement que nous pourrons voir s'ouvrir devant
nous les plus vastes horizons.
On raconte que Mahmoud, le
grand conquérant mahométan, détruisit au fur et à
mesure de ses victoires dans le nord de l'Inde, toutes les idoles qu'il
rencontrait sur son chemin. Il arriva dans la ville de Guggeratt, qui
contenait une idole vénérée tout spécialement
par les habitants. Les notables vinrent trouver le vainqueur et le supplièrent
d'épargner au moins ce dieu-là. Ils lui abandonnaient tous
les autres, mais si Mahmoud détruisait celui-là, ils préféraient
mourir!
Ils plaidèrent leur
cause avec une telle intensité que, pendant un instant, le cœur
du général fléchit. Il lui semblait par trop cruel
de priver ces pauvres gens de ce qu'ils aimaient mieux que la vie; mais
il se souvint qu'il avait fait serment de détruire toutes les idoles.
La volonté d'Allah était absolue. Il se fit apporter un
marteau, et d'un coup terrible fendit l'idole en deux. A sa stupéfaction,
il en sortit tout un flot de bijoux et de pierres précieuses. Les
habitants de la ville en avaient fait une cachette, et ils espéraient
que le vainqueur, en leur laissant l'idole, leur permettrait, à
son insu, de sauver leurs richesses. Voyez la perte qu'aurait subie le
vainqueur, s'il l'avait épargnée!
Y eut-il jamais une occasion
pareille à celle qui fut donnée aux conducteurs spirituels
de nos Eglises, à la conférence d'Edimbourg en 1910, d'abandonner
leurs idoles ecclésiastiques et d'entrer en contact avec les richesses
insondables du Christ? Il n'y a jamais eu dans les temps modernes, une
réunion ecclésiastique qui ait suscité plus d'espoirs.
Des leaders religieux étaient venus de toutes les parties du monde.
Plusieurs espéraient qu'une ère nouvelle allait s'ouvrir
pour les Missions. Le sujet du dernier jour était : "La Base de
l'arrière (The Home Base". Ce sujet faisait naître la vision
de magnifiques possibilités. Les Eglises des pays chrétiens,
fortifiées par le Saint-Esprit, allaient envoyer des hommes qualifiés
comme Paul et Barnabas. Avec de telles énormes ressources en argent
et en vocations, le monde allait être évangélisé
au cours d'une génération.
Hélas! ce n'était
qu'un rêve. Je n'ai jamais éprouvé une plus vive déception
que ce jour-là! De tous ceux qui parlèrent à cette
grande réunion, trois seulement mirent l'accent sur le Saint-Esprit
comme étant le grand facteur de l'évangélisation
du monde. A écouter les discours prononcés ce jour-là,
on était obligé de conclure, que pour donner l'Evangile
aux païens, il suffisait d'avoir une meilleure organisation, des
moyens matériels plus perfectionnés, un plus grand nombre
de vocations masculines et féminines. Il y avait pourtant des symptômes,
dans cette assemblée, qui faisaient prévoir que quelques
étincelles de plus auraient suffi pour produire une explosion.
Mais non! Il en aurait trop coûté de mettre à bas
l'idole ecclésiastique!
Frères, l'Esprit de
Dieu est toujours avec nous. La Pentecôte est à notre portée.
Si le Réveil nous est refusé, c'est qu'une idole est encore
adorée en cachette; c'est que nous mettons notre confiance dans
les plans humains. Nous nous refusons à croire cette vérité
immuable : "Ce n'est ni par la puissance,
ni par la force, mais c'est par MON ESPRIT, dit l'ETERNEL DES ARMEES"
(Zacharie 4/6).
Référence:
Par Mon Esprit, Jonathan Goforth -
Editions Viens et Vois